« Il y a un mystère Zweig. Comment cet écrivain des années trente, grand bourgeois à l’allure élégante et compassée, aux raffinements d’esthète, qui aurait dû en toute logique demeurer comme le prototype d’une époque révolue, a-t-il survécu à son temps, au point de séduire aujourd’hui des lecteurs de plus en plus jeunes ? Loin de connaître le sort de ses amis et contemporains, Jules Romains, Martin du Gard ou Arthur Schnitzler qui furent pourtant célèbres eux aussi, jadis, et de les rejoindre sur les étagères poussiéreuses des bibliothèques, il continue de captiver un public qui garde pour lui seul un engouement intact. » Européen convaincu et militant – il en a fait le combat de sa vie –, homme silencieux et réservé façonné par la Mitteleuropa, partisan d’une littérature non-engagée a contrario de ses pairs, Stefan Zweig fut un essayiste virtuose (son autobiographie Le Monde d’hier en est un exemple), un épistolier passionnant, un biographe contesté et surtout l’écrivain d’authentiques chefs-d’œuvre, nouvelles et romans confondus, où se mêlent amours perdues, peines égarées et sentiments confus. Au fil de cette biographie alerte, élégante et chargée de passion de l’écrivain juif autrichien, Dominique Bona s’approche au plus près de ce qui forme la substantifique moelle de l’œuvre zweigienne : un équilibre heureux entre la simplicité et l’érudition, entre le lyrisme et la concision, entre l’art de la commisération et celui d’échapper – toujours avec un égal brio – aux conventions.