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Liste des livres

Les Vies de papier de Rabih Alameddine
2016
Femina (étranger) 2016
Rabih Alameddine
Littérature étrangère
6½ h
Aaliya Saleh, 72 ans, les cheveux bleus, a toujours refusé les carcans imposés par la société libanaise. À l’ombre des murs anciens de son appartement, elle s’apprête pour son rituel préféré. Chaque année, le 1er janvier, après avoir allumé deux bougies pour Walter Benjamin, cette femme irrévérencieuse et un brin obsessionnelle commence à traduire en arabe l’une des œuvres de ses romanciers préférés : Kafka, Pessoa ou Nabokov.
À la fois refuge et “plaisir aveugle”, la littérature est l’air qu’elle respire, celui qui la fait vibrer comme cet opus de Chopin qu’elle ne cesse d’écouter. C’est eentourée de livres, de cartons remplis de papiers, de feuilles volantes de ses traductions qu’Aaliya se sent vivante.
Cheminant dans les rues, Aaliya se souvient ; de l’odeur de sa librairie, des conversations avec son amie Hannah, de ses lectures à la lueur de la bougie tandis que la guerre faisait rage, de la ville en feu, de l’imprévisibilité de Beyrouth.
Roman éblouissant à l’érudition joueuse, célébrant la beauté et la détresse de Beyrouth, Les Vies de papier est une véritable déclaration d’amour à la littérature.
Personne de Gwenaëlle Aubry
2009
Femina 2009
Gwenaëlle Aubry
Littérature
2½ h
Je ne sais pas quand je me suis dit pour la première fois «mon père est fou», quand j’ai adopté ce mot de folie, ce mot emphatique, vague, inquiétant et légèrement exaltant, qui ne nommait rien, en fait, rien d’autre que mon angoisse, cette terreur infantile, cette panique où je basculais avec lui et que toute ma vie d’adulte s’employait à recouvrir, un appel de lui et tout cela, le jardin, le soir d’été, la mer proche, volait en éclats, me laissant seule avec lui dans ce monde morcelé et muet qui était peut-être le réel même.
Personne est le portrait, en vingt-six angles et au centre absent, en vingt-six autres et au moi échappé, d’un mélancolique. Lettre après lettre, ce roman-abécédaire recompose la figure d’un disparu qui, de son vivant déjà, était étranger au monde et à lui-même. De «A» comme «Antonin Artaud» à «Z» comme «Zelig» en passant par «B» comme «Bond (James Bond)» ou «S» comme «SDF», défilent les doubles qu’il abritait, les rôles dans lesquels il se projetait. Personne, comme le nom de l’absence, personne comme l’identité d’un homme qui, pour n’avoir jamais fait bloc avec lui-même, a laissé place à tous les autres en lui, personne comme le masque, aussi, persona, que portent les vivants quand ils prêtent voix aux morts et la littérature quand elle prend le visage de la folie. Gwenaëlle Aubry est née en 1971. Personne est son cinquième roman.
Le Sud de Yves Berger
1962
Femina 1962
Yves Berger
Littérature
3½ h
En Provence, dans les années 1950, un père élève son fils et sa fille dans le culte des Indiens et de l’Amérique des années 1840. Muré dans son obsession d’arrêter le temps, ce notaire qui parle cherokee a prénommé sa fille Virginie et appelé sa jument Indiana. Virginie sera la première à s’arracher à cette illusion. En revanche, une fidélité morbide lie le fils au père, à ses mots, à son imaginaire américain. Inscrit au lycée de Montpellier, il retrouve sa sœur étudiante. Elle tente de l’affranchir des fables du père en le poussant à écrire un livre « plein d’histoires vraies », lui apprend l’argent, le travail et l’amour...
Le Sud, qui révéla en 1962 une voix unique de la littérature française, n’est pas un roman sur l’inceste. Yves Berger y affronte des thèmes plus vastes : le passage de l’enfance à l’âge d’homme, l’apprentissage de la vie, les pouvoirs et les poisons du verbe.
La cache de Christophe Boltanski
2015
Femina 2015
Christophe Boltanski
Littérature
4 h
« Nous avions peur. De tout, de rien, des autres, de nous-mêmes. De la petite comme de la grande histoire. Des honnêtes gens qui, selon les circonstances, peuvent se muer en criminels. De la réversibilité des hommes et de la vie. Du pire, car il est toujours sûr. Cette appréhension, ma famille me l’a transmise très tôt, presque à la naissance. »
Que se passe-t-il quand on tête au biberon à la fois le génie et les névroses d’une famille pas comme les autres, les Boltanski ? Que se passe-t-il quand un grand-père qui se pensait bien français, mais voilà la guerre qui arrive, doit se cacher des siens, chez lui, en plein Paris, dans un « entre-deux », comme un clandestin ? Quel est l’héritage de la peur, mais aussi de l’excentricité, du talent et de la liberté bohème ? Comment transmet-on le secret familial, le noyau d’ombre qui aurait pu tout engloutir ?
La Cache est le roman vrai des Boltanski, une plongée dans les arcanes de la création, une éducation insolite « Rue-de-Grenelle », de la Seconde Guerre mondiale à aujourd’hui. Et la révélation d’un auteur.
Montedidio de Erri De Luca
2003
Femina (étranger) 2002
Erri De Luca
Littérature italienne
2 h
Chacun de nous vit avec un ange, c’est ce qu’il dit, et les anges ne voyagent pas, si tu pars, tu le perds, tu dois en rencontrer un autre. Celui qu’il trouve à Naples est un ange lent, il ne vole pas, il va à pied : « Tu ne peux pas t’en aller à Jérusalem », lui dit-il aussitôt. Et que dois-je attendre, demande Rafaniello. « Cher Rav Daniel, lui répond l’ange qui connaît son vrai nom, tu iras à Jérusalem avec tes ailes. Moi je vais à pied même si je suis un ange et toi tu iras jusqu’au mur occidental de la ville sainte avec une paire d’ailes fortes, comme celles du vautour. » Et qui me les donnera, insiste Rafaniello. « Tu les as déjà, lui dit celui-ci, elles sont dans l’étui de ta bosse. » Rafaniello est triste de ne pas partir, heureux de sa bosse jusqu’ici un sac d’os et de pommes de terre sur le dos, impossible à décharger : ce sont des ailes, ce sont des ailes, me raconte-t-il en baissant de plus en plus la voix et les taches de rousseur remuent autour de ses yeux verts fixés en haut sur la grande fenêtre.
L'ensauvagement de Thérèse Delpech
2005
Femina (essai) 2005
Thérèse Delpech
Essai
5½ h
En 1900, les progrès sociaux, les avancées technologiques et une première tentative de limiter les guerres entre les Etats semblaient justifier des pronostics optimistes. Cinq ans plus tard pourtant, la guerre russo-japonaise, la première révolution russe et la crise de Tanger entre la France et l’Allemagne annonçaient la Grande Guerre et ses suites que seuls quelques observateurs perspicaces ont vues venir. Au tournant du XXIe siècle, les craintes se concentraient sur un gigantesque crash informatique. Mais en 2005, la scène internationale a profondément changé. Le Moyen-Orient et l’Extrême-Orient sont de bons candidats pour de nouvelles catastrophes historiques. La saga nucléaire iranienne, le chantage nord-coréen, la gravité de la question de Taïwan, l’hostilité sino-japonaise montrent que le terrorisme international est loin d’être le seul ou le principal péril du siècle. Pas davantage qu’en 1905 cependant, l’avenir n’est aujourd’hui écrit. Certes, l’humanité est à nouveau guettée par l’ensauvagement. Elle peut aussi prévenir la combinaison des moyens de destruction dont elle dispose et des penchants nihilistes issus de la détresse contemporaine. Quelles idées méritent encore que nos sociétés post-héroïques prennent des risques pour les défendre ? Telle est la question à laquelle cet ouvrage passionnant apporte des éléments de réponse.
 
 
Peste et Choléra de Patrick Deville
2012
Fnac (roman) 2012
Femina 2012
Patrick Deville
Littérature
3½ h
Parmi les jeunes chercheurs qui ont constitué la première équipe de l’Institut Pasteur créé en 1887, Alexandre Yersin aura mené la vie la plus mouvementée. Très vite il part en Asie, se fait marin, puis explorateur. Découvreur à Hong Kong, en 1894, du bacille de la peste, il s’installe en Indochine, à Nha Trang, loin du brouhaha des guerres, et multiplie les observations scientifiques, développe la culture de l’hévéa et de l’arbre à quinquina. Il meurt en 1943 pendant l’occupation japonaise. Pour raconter cette formidable aventure scientifique et humaine, Patrick Deville a suivi les traces de Yersin autour du monde, et s’est nourri des correspondances et documents déposés aux archives de l’Institut Pasteur.
 
 
Les croix de bois de Roland Dorgelès
1919
Femina 1919
Roland Dorgelès
Roman Histo
5 h
Les Croix de bois, chef-d’oeuvre de Roland Dorgelès, engagé volontaire, est un témoignage exceptionnel sur la Première Guerre Mondiale. Avec un réalisme parfois terrible mais toujours d’une généreuse humanité, la vie des tranchées nous est décrite dans toute son horreur et aussi sa bouffonnerie, son quotidien et ses moments exceptionnels.
 
 
Une vie française de Jean-Paul Dubois
2004
Femina 2004
Fnac (roman) 2004
Jean-Paul Dubois
Littérature
7½ h
Petit-fils de berger pyrénéen, fils d’une correctrice de presse et d’un concessionnaire Simca à Toulouse, Paul Blick est d’abord un enfant de la Ve République.
L’histoire de sa vie se confond avec celle d’une France qui crut à de Gaulle après 58 et à Pompidou après 68, s’offrit à Giscard avant de porter Mitterrand au pouvoir, pour se jeter finalement dans les bras de Chirac. Et Paul, dans tout ça ? Après avoir découvert, comme il se doit, les joies de la différence dans le lit d’une petite Anglaise, il fait de vagues études, devient journaliste sportif et épouse Anna, la fille de son patron.
Brillante chef d’entreprise, adepte d’Adam Smith et de la croissance à deux chiffres, celle-ci lui abandonne le terrain domestique. Devenu papa poule, Paul n’en mène pas moins une vie érotique aussi intense que secrète et se passionne pour les arbres, qu’il sait photographier comme personne. Une vraie série noire - krach boursier, faillite, accident mortel, folie - se chargera d’apporter à cette comédie française un dénouement digne d’une tragédie antique.
Jardinier mélancolique, Paul Blick prend discrètement congé, entre son petit-fils bien-aimé et sa fille schizophrène. Si l’on retrouve ici la plupart des “fondamentaux” de Jean-Paul Dubois - dentistes sadiques, femmes dominatrices, mésalliances et trahisons conjugales, sans parler des indispensables tondeuses à gazon -, on y découvre une construction romanesque dont l’ampleur tranche avec le laconisme de ses autres livres.
 
 
 
S'adapter de Clara Dupont-Monod
2021
Goncourt des lycéens 2021
Femina 2021
Clara Dupont-Monod
Littérature
2½ h
C’est l’histoire d’un enfant aux yeux noirs qui flottent, et s’échappent dans le vague, un enfant toujours allongé, aux joues douces et rebondies, aux jambes translucides et veinées de bleu, au filet de voix haut, aux pieds recourbés et au palais creux, un bébé éternel, un enfant inadapté qui trace une frontière invisible entre sa famille et les autres. C’est l’histoire de sa place dans la maison cévenole où il naît, au milieu de la nature puissante et des montagnes protectrices ; de sa place dans la fratrie et dans les enfances bouleversées. Celle de l’aîné qui fusionne avec l’enfant, qui, joue contre joue, attentionné et presque siamois, s’y attache, s’y abandonne et s’y perd. Celle de la cadette, en qui s’implante le dégoût et la colère, le rejet de l’enfant qui aspire la joie de ses parents et l’énergie de l’aîné. Celle du petit dernier qui vit dans l’ombre des fantômes familiaux tout en portant la renaissance d’un QSprésent hors de la mémoire.
Comme dans un conte, les pierres de la cour témoignent. Comme dans les contes, la force vient des enfants, de l’amour fou de l’aîné qui protège, de la cadette révoltée qui rejettera le chagrin pour sauver la famille à la dérive. Du dernier qui saura réconcilier les histoires.
La naissance d’un enfant handicapé racontée par sa fratrie.
Un livre magnifique et lumineux.
 
 
Matin perdu de Vergílio Ferreira
1990
Femina (étranger) 1990
Vergílio Ferreira
Littérature étrangère
3 h
Orphelin, Antonio est pris en charge vers quatorze ans par une riche bigote qui l’arrache à son univers de gueuserie pour l’envoyer au séminaire. L’adulte Antonio raconte comment la machine à broyer les volontés individuelles (...) transforme des costauds incultes (...) en solitaires douloureux ou en mécaniques à débiter du latin.
Canada de Richard Ford
2013
Femina (étranger) 2013
Richard Ford
Littérature
10 h
« D’abord, je vais vous raconter le hold-up que nos parents ont commis. Ensuite les meurtres, qui se sont produits plus tard. »
Great Falls, Montana, 1960. Dell Parsons a 15 ans lorsque ses parents braquent une banque, avec le fol espoir de rembourser un créancier menaçant. Le hold-up échoue, les parents sont arrêtés, et Dell a désormais le choix entre la fuite et l’orphelinat. Il traverse la frontière et trouve refuge dans un village du Saskatchewan, au Canada. Il est alors recueilli par le propriétaire d’un hôtel, Arthur Remlinger, qui le prend à son service. Charismatique, mystérieux, Remlinger est aussi recherché aux États-Unis... C’est la fin de l’innocence pour Dell qui, dans l’ombre de Remlinger, au sein d’une nature sauvage et d’une communauté pour qui seule compte la force brutale, cherche son propre chemin. Canada est le récit de ces années qui l’ont marqué à jamais. Ce roman, d’une puissance et d’une beauté exceptionnelles, marque le retour sur la scène littéraire d’un des plus grands écrivains américains contemporains.
Dire son nom de Francisco Goldman
2011
Femina (étranger) 2011
Francisco Goldman
Littérature étrangère
8½ h
En 2005, le romancier Francisco Goldman épouse au Mexique la jeune et brillante Aura Estrada, qui se destine elle aussi à devenir écrivain. Un mois avant leur second anniversaire de mariage, Aura se brise la nuque en faisant du bodysurf sur la côte mexicaine. Francisco, tenu pour responsable de l’accident par la famille d’Aura est rongé par la culpabilité et le chagrin. Il commence à écrire Dire son nom, un roman qui se présente comme la chronique de son amour pour Aura et de cette perte insurmontable. Désireux de garder vivant son souvenir, Francisco rassemble tout ce qui a un rapport avec elle. De son enfance et ses études à Mexico entourée d’une mère qui lui est dévouée corps et âme, jusqu’à son arrivée à l’Université de Columbia, en passant par leurs premiers moments de couple à New York, ou en voyage au Mexique et en Europe, Francisco Goldman cherche l’essence d’Aura. Il nous fait découvrir l’attachante singularité de leur couple et, ce faisant, il redonne vie à Aura, une jeune femme pleine d’esprit et d’énergie, lumineuse et exubérante. Avec toute l’empathie qui emplit ce roman, Francisco Goldman a su créer avec humour le portrait vivant d’un amour aussi joyeux et léger qu’il est profond et intense.
Sang impur de Hugo Hamilton
2004
Femina (étranger) 2004
Hugo Hamilton
Littérature étrangère
7 h
Issue de l’union d’une Berlinoise antinazie avec un nationaliste irlandais, une portée de gamins grandit dans les quartiers misérables du Dublin des années 1960. Talochés par un père dont les échecs affligent tout la famille, les petits Hamilton essuient au dehors les insultes du voisinage. Mais auprès de leur douce mère, Hugo, Franz et Maria apprennent le bonheur d’être en vie, de s’aimer et de se serrer fort contre les siens.
Une saison de machettes de Jean Hatzfeld
2003
Femina (essai) 2003
Jean Hatzfeld
Historique
5 h
Après avoir recueilli les récits des rescapés tutsis du génocide rwandais (Dans le nu de la vie. Prix France Culture) Hatzfeld, après de longs séjours sur place, dans la prison où ils étaient enfermés, la plupart déjà jugés, a fait parler les acteurs hutus du génocide, en l’occurrence une bande d’amis originaires de la même région qui, comme ils disent, sont allés « au boulot » ensemble, c’est-à-dire, ont, pendant plusieurs semaines, chaque jour, de la même façon que l’on va cultiver son champ, systématiquement « coupé » leurs « avoisinants », avec la claire idée de faire totalement disparaître les tutsis. Ils se sont confiés à l’auteur de façon complètement libre et directe sans soucis d’atténuer leur responsabilité, avec un naturel stupéfiant, y compris pour Hatzfeld. Jamais aucun « génocidaire » du siècle n’a témoigné de cette façon. C’est ce qui fait d’Une saison de machettes un livre exceptionnel, unique, d’une force sans exemple. On a là, éclairées par les commentaires précis de l’auteur, une sorte de saisie à la base des phénomènes qui conduisent des hommes ordinaires (l’un d’eux dit « bien naturels ») à exterminer de façon atroce et si possible jusqu’au dernier des voisins. Parmi les actes de barbarie, il y a une spécificité du génocide.
Les fous de Bassan de Anne Hébert
1982
Femina 1982
Anne Hébert
Littérature
4 h
Le vent, la pluie, la rumeur de la mer et la pesanteur du passé font de Griffin Creek, petit village du Québec, un lieu étrange et presque hors du monde. Un soir de l’été 1936, deux adolescentes vives et lumineuses, enviées ou désirées pour leur beauté par toute la petite communauté protestante du village, disparaissent près du rivage. A travers la voix ou les lettres de différents personnages, on assiste à la tragédie qui commence à se jouer, bouleversant ce village figé dans la tradition et le respect des Commandements.
La couleur de l'eau de Kerry Hudson
2015
Femina (étranger) 2015
Kerry Hudson
Littérature étrangère
7 h
Sous le charme, Dave, vigile dans un luxueux magasin londonien, laisse partir une jeune voleuse qu’il venait de surprendre. Sa journée terminée, il la découvre dehors, à l’attendre. C’est le début d’une relation complexe, entre deux êtres abîmés, chacun dissimulant un lourd passé. Comment Alena, venue avec tant de projets de sa Russie natale, se retrouve-t-elle à la rue et sans papiers ? Pourquoi Dave vit-il comme en exil à quelques kilomètres de chez lui ? Qu’ont-ils bien pu traverser l’un et l’autre pour être si tôt désabusés ? Le parcours d’Alena, lié aux réseaux de prostitution, est chargé de compromissions, de peurs et d’espoirs étouffés. L’histoire de Dave part des cités anglaises, à l’horizon bien bas, celle d’un garçon aux rêves d’aventure mais trop obéissant et un peu lâche. Page après page, ils s’apprivoisent, se rapprochent – en prenant soin d’éviter leurs zones d’ombre qui, bien évidemment, finiront par les rattraper.
Se gardant des clichés et du larmoyant, Kerry Hudson ne juge jamais ses personnages, elle les raconte, avec leurs fragilités et leurs faiblesses. De Londres à la Sibérie en passant par Moscou, elle tresse un récit d’une grande finesse et livre une moderne et atypique histoire d’amour.
Lignes de faille de Nancy Huston
2006
Femina 2006
Nancy Huston
Littérature
6½ h
Je tiens la main de m’man, sa main est avec moi à New York mais sa tête sillonne encore la planète : sans même nous demander comment on va, elle se met à parler à toute berzingue. Sa voix ne promet rien de bon alors je laisse les mots se produire là-haut, au niveau de la bouche des grandes personnes, pendant que moi je reste près du sol à étudier les milliers de pieds qui courent dans tous les sens. Je pense à ce qui se passerait si une bombe était lâchée sur JFK et que tous ces gens étaient soudain morts ou démembrés en train de patauger dans des flaques de sang. Ma chauve-souris me dit de monter le son des avions bombardiers le plus possible dans ma tête...
 
 
La serpe de Philippe Jaenada
2017
Femina 2017
Philippe Jaenada
Littérature
13 h
Un matin d’octobre 1941, dans un château sinistre au fin fond du Périgord, Henri Girard appelle au secours : dans la nuit, son père, sa tante et la bonne ont été massacrés à coups de serpe. Il est le seul survivant. Toutes les portes étaient fermées, aucune effraction n’est constatée. Dépensier, arrogant, violent, le jeune homme est l’unique héritier des victimes. Deux jours plus tôt, il a emprunté l’arme du crime aux voisins. Pourtant, au terme d’un procès retentissant (et trouble par certains aspects), il est acquitté et l’enquête abandonnée. Alors que l’opinion publique reste convaincue de sa culpabilité, Henri s’exile au Venezuela. Il rentre en France en 1950 avec le manuscrit du Salaire de la peur, écrit sous le pseudonyme de Georges Arnaud. Jamais le mystère du triple assassinat du château d’Escoire ne sera élucidé, laissant planer autour d’Henri Girard, jusqu’à la fin de sa vie (qui fut complexe, bouillonnante, exemplaire à bien des égards), un halo noir et sulfureux. Jamais, jusqu’à ce qu’un écrivain têtu et minutieux s’en mêle... Un fait divers aussi diabolique, un personnage aussi ambigu qu’Henri Girard ne pouvaient laisser Philippe Jaenada indifférent. Enfilant le costume de l’inspecteur amateur (complètement loufoque, mais plus sagace qu’il n’y paraît), il s’est plongé dans les archives, a reconstitué l’enquête et déniché les indices les plus ténus pour nous livrer ce récit haletant dont l’issue pourrait bien résoudre une énigme vieille de soixante-quinze ans.
Le Zêbre de Alexandre Jardin
1988
Femina 1988
Alexandre Jardin
Littérature
3 h
Gaspard Sauvage, dit le Zèbre, refuse de croire au déclin des passions. Bien que notaire de province, condition qui ne porte guère aux extravagances, le Zèbre est de ces irréguliers qui vivent au rythme de leurs humeurs fantasques.
Quinze ans après avoir épousé Camille, il décide de ressusciter l’ardeur des premiers temps de leur liaison. Insensiblement, la ferveur de leurs étreintes s’est muée en une complicité de vieux époux. Cette déconfiture désole Gaspard.
Loin de se résigner, il part à la reconquête de sa femme.
Grâce à des procédés cocasses et à des stratagèmes rocambolesques, il redeviendra celui qu’il n’aurait jamais dû cesser d’être : l’Amant de Camille, l’homme de ses rêves. Même la mort pour lui n’est pas un obstacle.
Bain de lune de Yanick Lahens
2014
Femina 2014
Yanick Lahens
Littérature
4 h
Après trois jours de tempête, un pêcheur découvre, échouée sur la grève, une jeune fille qui semble avoir réchappé à une grande violence. La voix de la naufragée s’élève, qui en appelle à tous les dieux du vaudou et à ses ancêtres, pour tenter de comprendre comment et pourquoi elle s’est retrouvée là. Cette voix expirante viendra scander l’ample roman familial que déploie Yanick Lahens, convoquant les trois générations qui ont précédé la jeune femme afin d’élucider le double mystère de son agression et de son identité.
Les Lafleur ont toujours vécu à Anse Bleue, un village d’Haïti où la terre et les eaux se confondent. Entre eux et les Mésidor, devenus les seigneurs des lieux, les liens sont anciens, et le ressentiment aussi. Il date du temps où les Mésidor ont fait main basse sur toutes les bonnes terres de la région.
Quand, au marché, Tertulien Mésidor s’arrête comme foudroyé devant l’étal d’Olmène (une Lafleur), l’attirance est réciproque. L’histoire de ces deux-là va s’écrire à rebours des idées reçues sur les femmes soumises et les hommes prédateurs.
Mais, dans cette île également balayée par les ouragans politiques, des rumeurs de terreur et de mort ne tardent pas à s’élever. Un voile sombre s’abat pour longtemps sur Anse Bleue.
Pour dire le monde nouveau, celui des fratries déchirées, des déprédations, de l’opportunisme politique, Yanick Lahens s’en remet au choeur immémorial des paysans : eux ne sont pas dupes, qui se fient aux seules puissances souterraines.
Leurs mots puissants, magiques, donnent à ce roman magistral une violente beauté.
Le lambeau de Philippe Lançon
2018
Femina 2018
Philippe Lançon
Littérature
10 h
Lambeau, subst. masc.
1. Morceau d’étoffe, de papier, de matière souple, déchiré ou arraché, détaché du tout ou y attenant en partie.
2. Par analogie : morceau de chair ou de peau arrachée volontairement ou accidentellement. Lambeau sanglant ; lambeaux de chair et de sang. Juan, désespéré, le mordit à la joue, déchira un lambeau de chair qui découvrait sa mâchoire (Borel, Champavert, 1833, p. 55).
3. Chirurgie : segment de parties molles conservées lors de l’amputation d’un membre pour recouvrir les parties osseuses et obtenir une cicatrice souple. Il ne restait plus après l’amputation qu’à rabattre le lambeau de chair sur la plaie, ainsi qu’une épaulette à plat (Zola, Débâcle, 1892, p. 338).  (Définitions extraites du Trésor de la Langue Française)
La vie est brève et le désir sans fin de Patrick Lapeyre
2010
Femina 2010
Patrick Lapeyre
Littérature
5 h
La vie est brève et le désir sans fin est un livre sur les affres de l’amour, vues du point de vue masculin. Il met en scène deux hommes, l’un marié, à Paris, l’autre pas, à Londres, tous les deux amoureux de la même femme, assez énigmatique, et qui va de l’un à l’autre. Il y a celui qui hésite, et celui qui attend, tous les deux souffrent.
Comment choisir ? Qui choisir ? Ce roman est l’histoire d’une inépuisable et inéluctable souffrance amoureuse plus forte que tout.
Et elle est racontée de l’inimitable manière qu’à Patrick Lapeyre de raconter le monde comme il ne va pas. Petites touches d’une acuité et d’une intelligence qui laissent confondu. Événements apparemment anodins qui ne le sont en fait pas du tout. Poétique de la métaphore, métaphores tellement inattendues et qui sont en réalité rien moins, une à une et peu à peu, qu’une pensée du monde. Humour profondément lucide et humain, généreux. D’où vient, lisant ce livre d’une insondable mélancolie que l’on ne puisse faire autrement que sourire, constamment sourire. Peut-être du bonheur d’avoir été reconnu ?
Jayne Mansfield 1967 de Simon Liberati
2011
Femina 2011
Simon Liberati
Bio
2 h
« Aux basses heures de la nuit, le 29 juin 1967 sur un tronçon de la route US 90 qui relie la ville de Biloxi à La Nouvelle-Orléans, une Buick Electra 225 bleu métallisé, modèle 66, se trouva engagée dans une collision mortelle. »
Dans cette Buick broyée se trouvait une femme, une “Hollywood movie star” de trente-quatre ans, danseuse nue à Las Vegas, célébrissime sex-symbol des années 50.
Simon Liberati ressuscite Jayne Mansfield, l’actrice méconnue la plus photographiée au monde, fouille amoureusement dans les recoins les plus ténébreux de sa vie, retrace ses dernières heures en plein été hippie, qui disent aussi le crépuscule de l’âge d’or hollywoodien. Au programme : perruques-pouf, LSD 26, satanisme, chihuahuas, amants cogneurs, vie désaxée, mort à la James Dean, cinq enfants orphelins et saut de l’ange dans l’underground.
Une oraison funèbre et morbide chic dans la droite ligne de Truman Capote et Kenneth Anger.
 
 
La Vérité sur Lorin Jones de Alison Lurie
1989
Femina (étranger) 1989
Alison Lurie
Policier
8 h
Véritable chronique de mœurs, roman policier, comédie baroque, La Vérité sur Lorin Jones est un miroir tendu à toute une génération de femmes qui jonglent avec le féminisme, le militantisme, les grands principes et les grands sentiments.
Le Garçon de Marcus Malte
2016
Femina 2016
Marcus Malte
Littérature
9½ h
Il n’a pas de nom. Il ne parle pas. Le garçon est un être quasi sauvage, né dans une contrée aride du sud de la France. Du monde, il ne connaît que sa mère et les alentours de leur cabane. Nous sommes en 1908 quand il se met en chemin – d’instinct. Alors commence la rencontre avec les hommes : les habitants d’un hameau perdu, Brabek l’ogre des Carpates, philosophe et lutteur de foire, l’amour combien charnel avec Emma, mélomane lumineuse, à la fois sœur, amante, mère. « C’est un temps où le garçon commence à entrevoir de quoi pourrait bien être, hélas, constituée l’existence : nombre de ravages et quelques ravissements. » Puis la guerre, l’effroyable carnage, paroxysme de la folie des hommes et de ce que l’on nomme la civilisation. Itinéraire d’une âme neuve qui s’éveille à la conscience au gré du hasard et de quelques nécessités, ponctué des petits et grands soubresauts de l’Histoire, le Garçon est à sa façon singulière, radicale, drôle, grave, l’immense roman de l’épreuve du monde.
 
 
Demain dans la bataille pense à moi de Javier Marías
1966
Femina (étranger) 1996
Javier Marías
Littérature étrangère
8½ h
« Jamais personne n’imagine se retrouver un jour avec une morte dans les bras, dont plus jamais il ne reverra le visage et dont seul le nom subsiste ». Non, Victor Francés, homme de lettres et scénariste, n’aurait jamais pu envisager une telle histoire ni croire qu’il pourrait en être le protagoniste. Et pourtant, alors qu’il répond à l’invitation galante d’une femme mariée qu’il connaît à peine, il assiste impuissant à son agonie. Victor doit choisir entre se compromettre... et fuir...
La saison de l'ombre de Léonara Miano
2013
Femina 2013
Léonara Miano
Littérature
4½ h
« Si leurs fils ne sont jamais retrouvés, si le ngambi ne révèle pas ce qui leur est arrivé, on ne racontera pas le chagrin de ces mères. La communauté oubliera les dix jeunes initiés, les deux hommes d’âge mûr, évaporés dans l’air au cours du grand incendie. Du feu lui-même, on ne dira plus rien. Qui goûte le souvenir des défaites ? »
Nous sommes en Afrique subsaharienne, quelque part à l’intérieur des terres, dans le clan Mulungo. Les fils aînés ont disparu, leurs mères sont regroupées à l’écart. Quel malheur vient de s’abattre sur le village ? Où sont les garçons ? Au cours d’une quête initiatique et périlleuse, les émissaire du clan, le chef Mukano, et trois mères courageuses, vont comprendre que leurs voisins, les BWele, les ont capturés et vendus aux étrangers venus du Nord par les eaux.
Dans ce roman puissant, Léonora Miano revient sur la traite négrière pour faire entendre la voix de celles et ceux à qui elle a volé un être cher. L’histoire de l’Afrique subsaharienne s’y drape dans une prose magnifique et mystérieuse, imprégnée du mysticisme, de croyances, et de « l’obligation d’inventer pour survivre. »
Pleine lune de Antonio Muñoz Molina
1998
Femina (étranger) 1998
Antonio Muñoz Molina
Littérature étrangère
9½ h
Une ville du sud de l’Andalousie battue par la pluie et le vent. Une fillette retrouvée morte sur le talus d’un parc. La peur telle une rumeur se répand dans la ville. S’engage alors une fantastique chasse à l’homme pour traquer l’assassin, personnage énigmatique et névrosé qui ne vit que dans la haine et trouve son unique plaisir dans la soumission du plus faible. « Comment peut il y avoir des gens aussi acharnés ? Comment peut on torturer des gens qui sont déjà anéantis ? »
Ethno - Roman de Tobie Nathan
2012
Femina (essai) 2012
Tobie Nathan
Essai
6 h
Né en Egypte, je suis égyptien, comme le furent mes ancêtres, enterrés dans le cimetière du Caire, à Bassatine, depuis des temps immémoriaux. Héritier de générations de rabbins, portant le nom du plus célèbre, je suis juif “au naturel”, pas dans l’excès de ceux qui, s’étant trop éloigné de Dieu, se collent à lui pour être certains de ne pas le perdre une nouvelle fois. Ayant vécu enfant à Rome, je suis italien, comme il était inscrit sur nos passeports. Grandi à Gennevilliers, je suis communiste, comme l’était cette ville, héritière des années de guerre. Ayant eu vingt ans en 68, j’ai à la fois vécu passionnément la révolution culturelle française et traversé les événements comme Fabrice à Waterloo. Formé à l’institut de psychanalyse de la rue Saint-Jacques, j’ai essayé d’épouser au moins l’identité de psychanalyste, mais je n’y suis pas parvenu. Je suis comme la goutte qui file entre les doigts pour s’en aller rejoindre la source...
Les Chutes de Joyce Carol Oates
2005
Femina (étranger) 2005
Joyce Carol Oates
Littérature américaine
11 h
Veuve au matin d’une nuit de noces hallucinante, lorsque son époux, un jeune pasteur, se suicide en se jetant dans les Chutes du Niagara, Ariah Littrell se considère désormais comme vouée au malheur. Pourtant, au cours de sa semaine de veille au bord de l’abîme, en attendant qu’on retrouve le corps de son mari d’un jour, “La Veuve blanche des Chutes” (ainsi que la presse l’a surnommée avant d’en faire une légende) attire l’attention de Dirk Burnaby, un brillant avocat au cœur tendre, très vite fasciné par cette jeune femme étrange.
Une passion improbable et néanmoins absolue lie très vite ce couple qui va connaître dix ans d’un bonheur total avant que la malédiction des Chutes s’abatte de nouveau sur la famille.
Désamour, trahison, meurtre ? C’est aux enfants Burnaby qu’il reviendra de découvrir les secrets de la tragédie qui a détruit la vie de leurs parents. Une quête qui les obligera à affronter non seulement leur histoire personnelle mais aussi un sombre épisode du passé de l’Amérique : les ravages infligés à toute une région par l’expansion industrielle gigantesque des années 50 et 60, expansion nourrie par la cupidité et la corruption des pouvoirs en place.
Ce roman aussi beau et tumultueux que ces Chutes au charme maléfique a remporté le Prix Femina étranger en 2005.
 
 
Purge de Sofi Oksanen
2010
Femina (étranger) 2010
Fnac (roman) 2010
Sofi Oksanen
Littérature étrangère
6½ h
« Un vrai chef-d’oeuvre. Une merveille.
J’espère que tous les lecteurs du monde, les vrais, liront Purge. »
Nancy Huston En 1992, l’Union Soviétique s’effondre et la population estonienne fête le départ des Russes. Mais la vieille Aliide, elle, redoute les pillages et vit terrée dans sa maison, au fin fond des campagnes.
Ainsi, lorsqu’elle trouve Zara dans son jardin, une jeune femme qui semble en grande détresse, elle hésite à lui ouvrir sa porte. Ces deux femmes vont faire connaissance, et un lourd secret de famille va se révéler, en lien avec le passé de l’occupation soviétique et l’amour qu’Aliide a ressenti pour Hans, un résistant. La vieille dame va alors décider de protéger Zara jusqu’au bout, quel qu’en soit le prix.
Sofi Oksanen s’empare de l’Histoire pour bâtir une tragédie familiale envoûtante. Haletant comme un film d’Hitchcock, son roman pose plusieurs questions passionnantes : peut-on vivre dans un pays occupé sans se compromettre ? Quel jugement peut-on porter sur ces trahisons ou actes de collaboration une fois disparu le poids de la contrainte ?
Des questions qui ne peuvent que résonner fortement dans la tête des lecteurs français.
 
 
Certaines n'avaient jamais vu la mer de Julie Otsuka
2012
Femina (étranger) 2012
Julie Otsuka
Littérature étrangère
2½ h
Japon, 1919. Un bateau quitte l’Empire du Levant avec à son bord plusieurs dizaines de jeunes femmes promises à des Japonais travaillant aux États-Unis, toutes mariées par procuration. À la façon d’un chœur antique, leurs voix s’élèvent et racontent leurs misérables vies d’exilées... leur nuit de noces, souvent brutale, leurs rudes journées de travail dans les champs, leurs combats pour apprivoiser une langue inconnue, l’humiliation des Blancs, le rejet par leur progéniture de leur patrimoine et de leur histoire...
Une véritable clameur jusqu’au silence de la guerre. Et l’oubli.
 
 
Par les routes de Sylvain Prudhomme
2019
Femina 2019
Sylvain Prudhomme
Littérature
4 h
J’ai retrouvé l’autostoppeur dans une petite ville du sud-est de la France, après des années sans penser à lui. Je l’ai retrouvé amoureux, installé, devenu père. Je me suis rappelé tout ce qui m’avait décidé, autrefois, à lui demander de sortir de ma vie. J’ai frappé à sa porte. J’ai rencontré Marie.
Sylvain Prudhomme, né en 1979, est auteur de romans et de reportages. Ses livres ont reçu plusieurs prix littéraires et sont traduits à l’étranger. Dans la collection « L’Arbalète », il a notamment publié Là, avait dit Bahi, Les grands et Légende. Avec Par les routes, il raconte la force de l’amitié et du désir, le vertige devant la multitude des existences possibles.
Port-Soudan de Olivier Rolin
1992
Femina 1994
Olivier Rolin
Littérature
1½ h
C’est à Port-Soudan que j’appris la mort de A.
Les hasards de la poste dans ces pays firent que la nouvelle m’en parvint assez longtemps après que mon ami eut cessé de vivre. Un fonctionnaire déguenillé, défiguré par la lèpre, porteur d’un gros revolver noir dont l’étui était noué à la ceinture par une lanière de fouet en buffle tressé, me remit la lettre vers la fin du jour. Son visage sans lèvres, aux oreilles en crêtes de coq, était un perpétuel ricanement. On eût dit son corps sculpté dans le bois sardonique d’une danse macabre. Comme presque tous ceux qui survivaient dans la ville, son office principal était d’ailleurs le racket et l’assassinat. Comment s’était-il procuré le pli, je l’ignore. Peut-être l’avait-il volé à la Mort elle-même.
Ce qui reste de nos vies de Zeruya Shalev
2014
Femina (étranger) 2014
Zeruya Shalev
Littérature étrangère
10 h
Hemda Horovitz vit sans doute ses derniers jours à l’hôpital de Jérusalem. Ses deux enfants lui rendent visite mais ce sont bien les souvenirs du passé qui accompagnent chaque geste, chaque détail au seuil de la mort. Il y a par exemple l’image de ce lac, près du kibboutz où Hemda est née, qui s’impose encore avec force à sa conscience. Les traces plus douloureuses de sa longue vie aussi, qui se glissent dans sa mémoire sans qu’elle puisse s’en libérer : son père trop exigeant, un mariage sans amour, puis cette difficulté à aimer équitablement ses deux enfants, Avner et Dina.
Ces deux derniers passent beaucoup de temps avec leur mère depuis l’hospitalisation. Avner, le fils adoré, y rencontre une femme venue dire au revoir à son mari mourant, et entame une étrange relation avec elle. Quant à Dina, la fille mal aimée, elle ne sait comment gérer l’éloignement de sa propre fille pour qui elle a pourtant sacrifié sa carrière. Débordée par le besoin de donner cet amour à quelqu’un, elle se met en tête d’adopter, envers et contre tous.
Son désir inébranlable de renforcer son foyer pour y accueillir un autre enfant risque bien de faire éclater sa famille. Zeruya Shalev sait parler comme personne des relations mystérieuses qui se tissent entre parents et enfants. Dans une langue puissante, elle évoque la colère, le ressentiment, la frustration et la peur qui construisent les familles autant que l’amour et le bonheur d’être ensemble.
Ce qui reste de nos vies est certainement son roman le plus envoûtant.
La porte de Magda Szabo
2005
Femina (étranger) 2003
Magda Szabo
Littérature étrangère
6 h
La Porte est une confession. La narratrice retrace sa relation avec Emerence qui fut sa femme de ménage pendant une vingtaine d’années. L’une est vieille, l’autre jeune, l’une sait à peine lire, l’autre ne « respire » que par les mots, l’une arbore l’humilité comme un blason, l’autre l’orgueil de l’intellectuelle sur-cultivée. Et pourtant la vieille servante va tout apprendre à l’écrivain adulée, car elle est la générosité incarnée ; dès qu’il s’agit de sauver une vie, celle d’un Juif, d’un Allemand, d’un voleur ou d’un chaton abandonné, Emerence ne réfléchit pas une seconde. La narratrice fait le portrait haut en couleur de ce personnage lumineux au caractère difficile et singulier, qui agit en véritable despote sur son entourage, qui consent à tout.
Les Adieux à la reine de Chantal Thomas
2002
Femina 2002
Chantal Thomas
Roman Histo
4½ h
Un silence consterné, quelques apartés, des ordres donnés, des seigneurs qui se déguisent en domestiques, et ces voitures au galop sur les chemins. Il n’y avait pas de lune en cette nuit du 16 juillet 1789, et lorsque je me suis retournée sur Versailles, le château, caché par la forêt encore plus sombre que le ciel, avait disparu. Je voudrais raconter cette désertion. Pour apaiser les intrus de mes nuits et adoucir l’isolement de mes jours, dans ma chambre, cet enclos de silence, de veille et d’écriture, que je ne quitte plus guère, et que je nomme, à mes heures, « mon château de Solitude ». J’accueillerai tout ce qui me reviendra à la mémoire, ces fragments d’un monde naufragé que je n’aurai pas le coeur de tuer, d’une rature, une seconde fois. Je ne cesse de prendre et reprendre en esprit les mêmes faits, de les métamorphoser au gré de mes songeries, tandis que d’autres, peut-être plus essentiels, se sont effacés. J’ai cette excuse : je parle d’il y a longtemps - d’un temps qui ne conduisait à rien et surtout pas à ce sinistre XIXème siècle, dont, par simplisme numérique et leurre rétrospectif, on le réduit à n’être que l’antichambre.
Le promontoire de Henri Thomas
1961
Femina 1961
Henri Thomas
Littérature
2 h
«S’il existe parmi nous des hommes, des femmes, pour qui la vie et la mort ne sont pas ce qu’elles sont pour nous, des êtres à qui manque, si l’on veut, notre sens de la mort et de la vie, ou qui possèdent un autre sens, tout aussi peu définissable que le nôtre, sinon que là où nous ressentons menace, vertige, négation, ils sont aussi loin de nous qu’un arbre ou qu’une pierre, qu’adviendra-t-il à celui qui, n’étant pas entièrement comme ceux-là, ne peut ni les fuir s’il les rencontre, ni les rejoindre tout à fait dans leur tranquillité sans nom » Henri Thomas.
Le Bouddha blanc de Hitonari Tsuji
2001
Femina (étranger) 1999
Hitonari Tsuji
Littérature étrangère
4½ h
Minoru Eguchi est armurier dans une île du sud du Japon, l’île d’Ôno. Sur son lit de mort, il se souvient de sa vie commencée à la fin du siècle dernier dans le Japon de la fin de l’ère Meiji. On le suit, lui et sa famille, à travers les guerres du XXe siècle, à travers la richesse ou la pauvreté, à travers les interrogations sur la vie, l’amour, la mort.
Pour s’assurer qu’aucune âme n’errera solitaire sans trouver le repos, il entreprendra la construction d’une immense statue qui donne son titre au roman. Un Bouddha debout, parce qu’un « Bouddha assis ne peut secourir un enfant qui se noie, tandis qu’un Bouddha debout peut se précipiter au secours de tous ceux qui en ont besoin. » Un Bouddha édifié avec les ossements de tous les morts de l’île d’Ôno. « Un Bouddha qui symboliserait la promesse de se revoir dans l’autre monde. Une sépulture qui ne serait jamais délaissée par les vivants, tant que l’île existerait. »
Maurice à la poule de Matthias Zschokke
2009
Femina (étranger) 2009
Matthias Zschokke
Littérature étrangère
5 h
Maurice passe ses jours dans son bureau du quartier nord de Berlin, là où débarquent les habitants de l’Est, une zone déclarée « sensible ». Il écrit à son ami et associé Hamid à Genève, le plus souvent il ne fait rien. De l’autre côté de la cloison, quelqu’un joue du violoncelle, cela l’apaise, mais il ne réussit pas à dénicher le musicien tant le dédale des immeubles est inextricable. Il fréquente souvent le Café Solitaire, la Papeterie de Carole, passe devant le Bar à Films de Jacqueline, des lieux dont les propriétaires changent souvent pour cause de faillite. Dans ce roman fait de détails, d’esquisses et de lettres, Zschokke met en scène des existences sans gloire, des êtres blessés par la vie, pour qui il nourrit une tendresse sans limites.
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