Djian, pendant plus de trois cents pages, ne cesse de revenir sur son passé dans une France de Meudon inventée par Céline, avec moutards et tractions avant, grisaille et pauvreté, pavillons de banlieue et fins de mois difficiles. Heureusement, il y a l’Amérique, son bonheur matinal, ses breaks rutilants, ses grandes étendues liquides, ses maisons de bois aux couleurs lie-de-vin, ses joggers fluo, ses dunes ouvertes sur des paysages d’avant l’homme, ses forêts aux sourdes pulsions, ses freeways qui montent vers la nuit avec tant de douceur. L’Amérique de Djian est lisse, lavée, pimpante. Ce pays-là, sous la plume de Djian, a des couleurs de cerf-volant qui vibre en plein bleu du ciel. Et là, on retrouve le Djian foldingue d’écriture, de sensations : ce regard nettoyé, un peu cru, primitif, qui a fait sa réputation et qui l’a fait aimer, en France, pas plus d’un million de lecteurs.