2014-03-26 13:15
Amis lecteurs qui êtes à la recherche de sensations flippo-gores, passez votre chemin ! En effet, “World War Z” n’est pas un livre de morts-vivants comme les autres : il s’agit là d’un recueil de témoignages des survivants de la Troisième Guerre Mondiale zombie par un émissaire d’une sous-commission de l’ONU (ou du moins ce qu’il en reste). Alors on passera donc (un peu) côté sensationnel mais le récit n’en reste pas moins très fort selon les protagonistes interviewés ! Ainsi, comme annoncé en introduction du roman, le travail du narrateur consistait à rassembler des éléments qui permettraient de dresser un rapport pour comprendre et analyser les faits, de ce qui a foiré à ce qui a permis à l’humanité de s’en sortir (fortement amoindrie certes). Une fois le boulot accompli, il décide de publier les propos dans leur intégralité, histoire d’humaniser les événements, une sorte de “devoir de mémoire” selon l’expression consacrée (pas pour se faire du blé sur le dos de la guerre, hein, ça n’arrive jamais ça !). Et ce qui en ressort est foutrement intéressant. C’est vrai qu’il y a quelques ratages en matière géopolitique (si, à mon petit niveau - c’est à dire quelqu’un qui regarde “le dessous des cartes” sur Arte -, j’ai réussi à en reconnaître certains, je n’ose imaginer les bonds que pourrait faire quelqu’un de vraiment calé là-dessus... Cela dit, je ne pense pas que ce soit le genre de bouquins qui va d’emblée intéresser les économistes et autres historiens) mais l’auteur arrive toujours à s’en tirer par une habile pirouette (du “vous connaissez la situation d’avant-guerre” de connivence, genre “c’est pas tout à fait pareil que ce que vous pensez savoir à l’heure actuelle, vous, pauvres lecteurs encore ignorants”). Bien sûr il y a des clichés mais, venant d’un américain (ou de n’importe quel occidental d’ailleurs) ça aurait pu être bien pire. Ce qui sauve les incohérences et les imprécisions, c’est justement l’aspect témoignage : 1) la plupart des personnes interviewées souffrent d’un sévère SPT facilement compréhensible ce qui tend à excuser pas mal de choses. 2) les propos retranscrits sont de l’ordre de la responsabilité individuelle et ne se veulent en aucun cas avoir une quelconque portée universelle ou représentative du peuple ou de la nation d’origine. Parce que c’est ça qui rend ce livre passionnant : plutôt que de suivre un héros qui va être confronté à une accumulation de situations de survie plus ou moins terrifiantes, on rencontre une multitude de survivants, plus ou moins anonymes, plus ou moins héroïques, plus ou moins traumatisés aussi. Le travail fourni par l’auteur pour créer des personnalités aussi différentes de par leur âge, leurs origines géographiques et culturelles, leurs histoires personnelles, familiales et professionnelles, est impressionnant (et très malin aussi). Comme évoqué plus tôt, on ne passe pas ici non plus à côté de quelques poncifs mais, merde, faut le faire quand même ! Au final, les zombies (et plusieurs passages particulièrement horrifiques) ne sont (presque) qu’un prétexte pour aborder différentes facettes de l’être humain en situation de crise (intense), un livre de guerre en somme : les exactions, l’instinct de survie, le sacrifice, la peur, l’abandon, la rébellion... Et surtout ce moment, particulièrement angoissant : le point de rupture où la psyché craque, de manière irréversible.