On rentre très vite dans ce nouveau récit construit différemment. (Et je le dis tout de suite : non, on ne saura jamais qui est le narrateur de ces histoires. Pfffff... Encore un mystère intéressant non résolu.) Clairement, le plan de Scribb est immense, machiavélique et furieusement efficace. On a vraiment de l’action, du suspense et du mystère dans le début de ce tome 7, ce qui relance bien l’intérêt du lecteur. On sent vraiment que ce qui se passe est grave. Et l’arrivée de tous les enfants jusqu’alors venus à Narnia est limite jouissive, car on se dit qu’ENFIN quelque chose d’exaltant est en train de se produire, qu’ENFIN, Lewis a compris comment il fallait tenir le lecteur en haleine. On comprend également pourquoi il y a eu tous ces tomes avant, alors qu’on ne voyait pas l’intérêt de certains, à l’image du Cheval et son écuyer. Tout prend enfin sens dans ce dernier chapitre et ça fait plaisir de voir qu’on n’a pas lu le reste pour rien. D’ailleurs, l’idée de faire les films dans l’ordre de publication devient alors complètement ridicule ! Certes, c’est pour le commerce, mais au final on y perd, niveau compréhension globale et hiérarchie des évènements.
Maintenant, toute la première partie est très bonne, malgré ses petits défauts habituels. A force, on fait avec. Mais malheureusement la fin ne suit pas. Quel dommage !
Une fois l’ennemi réduit à néant (et franchement y a du lourd, avec l’arrivée de Tash le dieu du tome 3 - on sent d’où viennent certaines inspirations de Rowling pour Harry Potter), toute la bande se retrouve avec Aslan qui détruit (attention spoiler) le monde de Narnia, tout comme il l’a créé au tome 1 ! Au départ on se dit : “ok, c’est une fin honorable, même si on ne pensait pas que Narnia aurait une fin”. Sauf que tenez-vous bien, on apprend qu’en fait ce n’était pas le vrai Narnia, révélation soutenue par une rhétorique à la mords-moi-le-noeud sur “l’intérieur est l’extérieur” et vice-versa... J’en ai perdu mon latin que je n’ai pas.
Et de terminer, par contre, sur quelque chose de décevant. On avait compris depuis longtemps que Narnia était une allégorie du Paradis. Soit, mais (attention ne lisez pas si vous comptez vous lancer dans la lecture) on apprend une dizaine de lignes avant la fin qu’en fait tout le monde est mort (que depuis le début du tome 7, pas depuis le tout début). Aslan annonce ça comme si c’était “top génialissime” d’être mort, en quatrième vitesse comme si ce n’était qu’un détail. Cela ne semble perturber personne, pas même les enfants, parce que de toute façon, ils vivent désormais une vie merveilleuse au Paradis, enfin au “vrai” Narnia.
C’est vraiment dommage, car ce tome 7 augurait une action digne de celle du dernier tome d’Harry Potter et se termine au lieu de ça en plébiscite pour le christianisme, même si on le savait déjà avant. La morale finale insistant sur le monde merveilleux de l’au-delà est trop rose bonbon pour être un tant soit peu crédible, enviable ou espérable (tant pis, j’invente un mot). Cela ne m’étonne guère que pour éduquer les petits à une morale chrétienne on leur donne ce livre à lire. Entre plébiscite et propagande, parfois la frontière est mince.
Pour terminer j’aurais vraiment souhaité que ce tome-là soit adapté au cinéma, ne serait-ce que pour profiter à l’écran du plan de Scribb, de l’arrivée providentielle des enfants, tous réunis (Moseley ??), de Tash enfin matérialisé et de la fin du monde, le tout présenté comme Andrew Adamson a si bien su le faire dans les deux premiers volets.