Cette machine à brouillard est un petit bijoux. Elle est d’une grande clarté, du moins pour le lecteur. Nous ne sommes pas du tout dans le brouillard ! Peut-être même pas assez, c’est pour cela que je ne lui ait pas mis la note maximale, mais j’y reviendrais, sous spoiler, évidemment.
Tito Desforges n’a pas grand chose à envier au maître du genre : Stephen King bien sûr. La narration s’adapte à l’histoire tout en la portant, le style est fluide, rythmé, sans temps morts, juste occasionnellement, un petit temps pour nous permettre de respirer, les scènes sont très visuelles... un vrai plaisir à lire. Quelques dommages collatéraux ne lui font pas peur non plus... Il situe son histoire en Australie, mais en changeant seulement quelques détails au décor, elle pourrait très bien se dérouler dans l’Amérique profonde chère au Maître.
Sans trop en dévoiler, nous revivons le parcours d’un ancien militaire par le prisme de sa thérapie psychiatrique. Ceci donne une certaine originalité à ce récit. Il s’agit en premier lieu des comptes-rendus des séances entre le patient, son psychiatre et l’assistant de celui-ci. Ensuite la thérapie amène le patient à écrire sa propre histoire, pour notre plus grand plaisir.
Ses phases d’instabilité mentale sont bien rendues par le phrasé, que se soit par le champ lexicale, les répétitions, l’absence de ponctuation. ou l’orthographe et les mots approximatifs.
Une bande de coton blanc bleuté, lourde et implacable comme une houle, progressait entre les travées les plus proches de moi, avalant les boîtes de soupe et de nouilles cuisinées
Nous franchissons également une étape importante quand, au vu de ce qui a précédé et qui ne correspondait pas franchement à un monde de bisounours, le patient annonce son changement de comportement pour la suite du récit :
Là, je devins authentiquement timbré.
Mon regret sur ce livre vient principalement
de la fille du patient, avec laquelle il fait un roadtrip qui tourne un peu au cauchemar... Il m’a semblé très vite évident qu’il était seul, que la présence de sa fille était juste fantasmée. Dommage que l’auteur n’ai pas réussi à prolonger l’incertitude plus longtemps. Quelques détails aussi m’ont perturbés, comme la bagarre dans le bar avec les miroirs et bouteilles qui volent en morceaux aux pieds de notre personnage principale qui est pied nu, et que cela ne perturbe ni sur le moment, ni après son combat.
Comme fil rouge, il y a d’incessante référence à l’excellent “Vol au-dessus d’un nid ce coucou”, cela a fini par me donner envie de le revoir !
Sur la fin, Tito Desforges nous laisse entrevoir le succès d’une telle thérapie sur ce patient.
Hélas nous devons très vite déchanter, la thérapie n’aura pas amené les résultats attendus, mais elle nous aura quand même permis de nous tenir en haleine pendant un agréable moment