J’ai reçu ce livre dans le cadre de la sélection Polar pour le prix des lecteurs du livre de poche. Pour moi ce n’est pas un Polar, mais un pavé (900 pages en poche quand même) à classer en Thriller/Espionnage. Et c’est un excellent livre !
Malgré sa “petite” taille, je l’ai bouclé en un week-end ! Les 3 jours pluvieux de ce premier week-end de mai m’ont quand même bien aidé ! Comme vous l’aurez compris, il est très difficile à lâcher. Sa construction peu sembler étrange et risquée mais cela passe plus que bien.
Le narrateur est un super espion, héros du livre, qui va essayer de sauver le monde, forcément... Il n’hésite pas à partir dans des flashbacks et des flashbacks de flashbacks. Il faudra quand même plus de 200 pages pour revenir au niveau du premier chapitre... Il glisse aussi régulièrement des allusions sur le passé ou le futur de la narration, comme “si j’avais su” ou en parlant d’un détail “malheureusement je n’ai pas fait assez attention à...”. C’est d’autant plus frustrant que l’on ne sait jamais si ces “détails” auront un impact majeur ou négligeable sur la suite des événements.
Les chapitres sont très courts, quelques pages seulement. Ils servent, ou pas, de changement de période ou de lieu. Terry Hayes nous promène dans un grand nombre de pays.
Malgré tout cela, l’auteur ayant beaucoup plus de talent que moi, l’ensemble reste plus que fluide, je n’ai jamais été perdu, que ce soit dans les lieux, les périodes, les historiques ou les personnages.
Le tout commence par un meurtre sordide dans un bouge de New York et va rapidement évoluer en “un” meurtre beaucoup plus complexe qui va s’entrelacer avec une chasse au terroriste au plus haut niveau.
Dans une lignée post 11-Septembre, Terry Hayes pousse plus loin les risques d’attentats majeurs en s’orientant sur les risques biologiques favorisés par l’évolution des matériels et des connaissances facilement disponibles via internet. Il pointe également les risques engendrés par la délocalisation de certaines industries américaines (valable pour un certain nombre de pays industrialisé), ainsi que sur la perméabilité des frontières européennes. Dans les risques qu’il pointe, il y a la perte de maîtrise dans la fabrication mais surtout dans les contrôles pour des raisons de coûts. Le tout faisant particulièrement froid dans le dos. L’auteur nous emporte dans le monde ignoble de l’espionnage, dont il vaut mieux ne rien savoir pour continuer à bien dormir.
Malgré l’attentat majeur et indéfendable que prépare son “méchant”, j’ai senti que l’auteur avait une certaine empathie pour lui. Il arrive à nous la faire partager et cela contribue aussi à l’intérêt du livre. Les événements de la jeunesse de ce personnage, couplée à une forte intelligence, induisent d’une certaine manière son évolution vers le terrorisme ultime.
L’intérêt de la narration vient aussi de la différence de ton : nous sentons le terroriste particulièrement impliqué et croyant en une inspiration divine alors que le récit du narrateur est relativement détaché. Et ce, même s’il est au coeur de l’action et que pour certaines d’entre elles, il ne s’en sort qu’in extremis. Contrairement à d’autres livres où l’on a l’impression que le personnage est un super super héros, ici tout reste crédible, je n’ai pas eu cette désagréable impression que l’auteur tirait au maximum sur la corde.
Terry Hayes aurait-il un penchant bouddhiste ? Je me le suis demandé car le ressort de son livre est basé sur le principe de “Tous nos actes nous reviennent”, mis en évidence ici par la politique étrangère des Etats-Unis, la publication libre de certains informations, la délocalisation à outrance... Il nous fait également profiter à plusieurs reprise de cette maxime : Exactement comme me l’avait dit le moine bouddhiste sur la route de Khun Yuam il y avait tant d’année : si vous voulez être libre, il suffit de lâcher prise.