Avec
Expresso Love, j’ai découvert un très joli roman d’Anticipation. Je met une majuscule car c’est de la “vraie” et bonne anticipation, et non pas de la SF de gare comme on peut malheureusement en trouver et qui dénature ce genre.
Bernard Viallet nous projette de quelques siècles dans le futur à travers deux histoires racontées en parallèle et n’ayant a priori aucun point commun. D’un coté nous avons cette bonne vieille Terre devenu un taudis post-apocalypse avec des clans qui gèrent la pénurie, ainsi que le rationnement et le troc, dans des villes réduites à l’état de gigantesques bidonvilles. De l’autre coté, nous avons les nouvelles planètes où ont éclos de somptueux îlots d’une civilisation de loisirs et où tout est possible pour les riches. Dans celle-ci vit notre personnage principal qui après être parti de la base (orphelin originaire d’un astéroïde minier du nom d’Or-well 1984) va gravir assez rapidement les échelons du monde du spectacle. Bernard Viallet en profite pour nous renvoyer en miroir notre télé actuelle. Les quelques siècles écoulés lui permettent de forcer le trait satirique. En passant, j’ai relevé des allusions à Laurent Ruquier, Ardisson, Bafi, Amélie Nothomb (Amélie Pompon). Pris par ma lecture, et n’étant pas non plus accroc à certaines émissions actuelles ou passées, je n’ai pas toujours cherché à découvrir qui se cachait derrières ces pseudos ou ces allusions. Deux petits exemples quand même :Maître Gapetto, huissier des jeux
Tout le monde se souvient du strip poker de Franz Gabrel et de Patrick Prunelle, deux chanteurs populaires qui se détestaient cordialement. [...] Quelques filles hystériques se cassaient la voix à crier des : « Patriiiiiiiiiiiiiiiiiick » et des « Fraaaaaaaaaaanz » suraigus.
L’auteur profite également de la partie se déroulant sur Terre, pour délivrer un début de message sur l’empreinte écologique de l’humanité. Message sur lequel il revient à la fin du livre de manière plus fracassante à propos de l’expansion humaine en y apportant une “solution” des plus radicales.
Bien évidemment les deux histoires se rejoignent, de manière improbable et permettent à l’auteur de délivrer son message. Pour moi, écrire de la bonne anticipation, ce n’est pas simplement placer une histoire dans un futur plus ou moins proche. Il faut aussi un message, plus quelques autres ingrédients que l’auteur n’a pas oublié ici : gadgets futuristes, romance, amour libre... Rare, mais ô combien agréable, il y a aussi ajouté l’humour. Quand au message délivré... lisez
Expresso Love !
Pour l’anecdote, pour ceux qui supposaient qu’entre une Terre pauvre et des planètes dominées par les loisirs, les impôts avait disparu... perdu, il y a même la fameuse: IPP (impôt progressif prévisionnel) :...cet impôt ne porte pas sur des bénéfices ou des revenus acquis, mais sur ceux qui sont susceptibles d’être obtenus dans l’avenir, donc sur de l’argent potentiel et qui n’existera peut-être jamais si la société n’atteint pas ses objectifs.
...le gouvernement du Metzouki a eu l’habileté de la faire voter par la Haute Assemblée au moment des vacances généralisées, quand tout le monde se dorait la pilule sur les bords ensoleillés de la Mer de Volupté et personne n’a réagi.