Syngué sabour. Pierre de patience
2008
2 h
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Syngué sabour est le troisième roman d’Atiq Rahimi, romancier et réalisateur afghan né à Kaboul en 1962. C’est néanmoins son premier roman écrit directement en français.
« D’un geste brusque, elle fait glisser sa main vers le bas, sous sa robe, entre ses cuisses. Ferme les yeux. Respire profondément, douloureusement. Elle enfonce les doigts entre ses jambes, comme si elle allait y planter une lame. […] Sa main descend près du nez de l’homme. “Tu es né de ce sang ! Il est plus propre que ton propre sang à toi !” » « Quelque part en Afghanistan ou ailleurs. » Le ton est donné. C’est l’intérieur de sa féminité que donne à voir, à sentir, la femme de Syngué sabour. Pour la première fois de sa vie, quelque chose lui offre la parole. Unique et ultime occasion de raconter ses souffrances. Et l’on voit ainsi sa langue se délier tandis que l’auteur, lui, tient fermement son rôle de caméra de sûreté. Sans jamais sortir de la pièce, il observe les allées et venues de la femme et tend de nouveaux ponts entre la littérature et le cinéma en décrivant l’ultra-fureur de la femme avec les instruments les plus glacés qu’offre le langage. Ainsi désubjectivé, il peut aussi bien affronter les crises de folies, les prières, les intrusions de pilleurs ou la vie secrète des insectes. À la lecture des 150 pages de Syngué sabour, on s’interroge sur la nature profonde de cette pierre de patience prête à exploser à force d’avoir reçu trop de malheurs. Peut-être qu’au-delà de la clef que nous livre l’auteur, cette pierre, c’est aussi le livre qu’on vient de refermer.