2014-01-30 18:23
Depuis longtemps j’entends parler de Carrie mais jamais je n’avais cherché à le lire, alors pour la sortie de la nouvelle adaptation, je me suis dit que c’était le moment. Malheureusement le livre est victime de son succès. L’idée de base du roman est absolument géniale : une jeune fille martyrisée par ses camarades qui ne peut trouver le repos chez elle car maltraitée par sa mère. Comment Carrie a-t-elle pu tenir seize ans sans péter les plombs, c’est déjà ce que l’on pourrait se demander en premier lieu. Les pouvoirs télékinétiques de Carrie sont bien évidemment le centre du roman mais au-delà de cela, ce qui fait que le scénario est exceptionnel, c’est la patte du maître. Il y a dans l’élaboration des livres ce qu’on appelle des portes scénaristiques. Quand un auteur en ouvre une (qu’il crée une intrigue ou un sujet avec un mystère), il se doit de le résoudre, c’est à dire de refermer la porte. Le grand talent réside dans le fait que King a ouvert une multitude de portes et les a (selon moi) toute refermées avec subtilité et brio. Un détail tout de fois : comme je l’ai dit, je connaissais Carrie pour en avoir beaucoup entendu parler à la télé, notamment dans un épisode de je ne sais quelle série policière qui détaillait le livre. J’ai été fascinée avant même de l’avoir lu et ai retrouvée cette fascination dès les premières pages du roman. Malheureusement, les effets scénaristiques et ingénieux d’écriture de Stephen King ont complètement été cassés par le fait que je connaissais les grandes lignes de la fin. Ainsi s’explique que je dis le livre victime de son succès. Ce qui fut une découverte grandiose est le talent de la mise en scène que possède King. L’auteur insère dans le récit des fragments d’articles et de romans que l’on sent et sait détachés de la trame narrative car étant postérieur à ce qui est narré. Cette astuce crée empressement, curiosité et suspense sur l’événement dont ils n’arrêtent pas de parler tous mais dont on ignore le sujet (pour ceux qui vivent dans une grotte et n’ont jamais entendu parler de Carrie). La façon dont Stephen King entre dans la tête de chacun de ses personnages est absolument fascinante. Il décrit le mal-être de Carrie et l’horreur de l’adolescence avec beaucoup de justesse, ce qui m’a bluffée. Un gros coup de cœur pour l’écriture de THE King. Je me répète mais il n’est pas étonnant que la pauvre Carrie soit dérangée dans sa tête. Pas vraiment attendrissante, Carrie est très gauche du fait de son éducation particulière mais le lecteur ne peut s’empêcher d’avoir pitié pour elle qui a commis une erreur en début de scolarité ce qui a suffit pour être le souffre-douleur à vie de ses camarades. Le plus horrible dans tout cela est que les élèves considèrent cela comme normal vu qu’il en toujours été ainsi. Mais avec cette certaine pitié, j’ai aussi éprouvé comme la professeur de sport, cette exaspération (seulement au début) devant cette fille qui, à seize ans, n’est plus une enfant et devrait cesser de geindre et savoir un peu se débrouiller toute seule. Stephen King disait que la clé dans ses romans pour qu’il fasse ressentir des émotions est de faire en sorte de lier le personnage au lecteur. Avec le personnage de Carrie, je comprends parfaitement ce qu’il a voulu dire et j’admire une fois de plus le tour de force. Même si je comprends aussi pourquoi Carrie s’oppose à sa mère, je trouve que cela est trop soudain comme sortie de nul part. C’est le seul point dans l’évolution psychologique de l’héroïne qui me gène. Les autres personnages sont beaucoup moins intéressants mais sont chacun des types humains dont la majorité sont les pires. L’adolescence est un passage ingrat et cruel, une chose que démontre King avec application. Avec la mère de Carrie, il s’attaque au fanatisme et l’extrémisme religion qui sont pire que tout ce que l’on aurait pu imaginer. En somme, un très bon roman, même lorsque l’on sait déjà la fin, qui doit atteindre la perfection quand on ne le connait absolument pas. A lire absolument ne serait-ce que pour l’auteur mais surtout parce que c’est un classique